mardi 21 octobre 2014

Conversation-17- avec Cora




- Mon Dieu te revoilà déjà, ma chérie ! Je pense que j’ai dû te faire une méchante impression à ta dernière visite. T’inquiète je ne suis pas suicidaire, j’adore la vie et je ne suis pas pressée de passer l’arme à gauche !
- J ‘ai eu du mal à arriver jusqu’à vous à travers la manifestation « Pour la famille ».
- Qu’est ce que cela veut dire « Pour la famille » ?
-Ne me dites pas que vous n’en savez vraiment rien !
- Tout de même je suis au courant ! Les media regorgent d’explications et de commentaires  qui vont des mariages homosexuels aux mères porteuses en passant par la  F.I.V, la  G .M .A, la  P.M.A …et hier j’ai entendu parler de la congélation des ovocytes qui permettrait aux femmes d’avoir des enfants avec qui et quand elles le désirent… Sans compter avec les querelles sur l’adoption ! On ne peut guère ignorer toutes ces questions, le salmigondis qui en est fait et les polémiques sur les réponses ….
- Effectivement les problèmes sont complexes et posent des questions d’éthique mais chaque fois que la science fait une découverte il faut  s’attendre à ce qu’elle passe dans le domaine des applications.
- J’ai peur que notre conversation sur ces sujets, dont même les spécialistes ne mesurent  vraiment pas les tenants et les aboutissants,  ressemble à une naïve  brève de comptoir ! Pour ce que je peux comprendre mon souci est qu’un enfant devrait être  « le même » quelle que soit la façon dont il est venu au monde et chéri également. Comment va-t-il évoluer dans tous ces cas de figure ? On connait mieux maintenant les difficultés  que rencontrent certains  enfants adoptés et même quelquefois ceux qui vivent dans des familles dites recomposées, alors avec toutes ces nouvelles possibilités…
- Il y a aussi  des malheureux dans des familles « traditionnelles » …
- Hélas. Mais tu vois l’avantage d’être un vieux machin comme moi, c’est de s’intéresser à tout, au flot des évolutions sociales…Mais depuis la rive.
- La famille, les enfants ce devait être plus simple autrefois ?
- Plus simple mais tout aussi difficile, tiens, cela  me donne l’occasion de te parler de mes parents.
Après la guerre en 1919 mon  père, dix-neuf ans, était frais diplômé de Joinville. Le sport n’étant pas à l’époque un moyen de gagner sa vie, il a passé tous les concours administratifs ouverts en priorité aux rescapés de la Grande guerre. Il avait depuis son enfance la passion des chiffres et  depuis ses années de collège il gagnait pratiquement autant que son père en tenant la comptabilité des commerçants de son quartier. Le voilà donc  Commis des contributions indirectes. Je suppose que, si jeune, après avoir vécu l’horreur, il n’avait guère envie de rentrer illico dans un carcan administratif. D’ailleurs une de mes tantes, toute confuse de me faire pareille révélation, m’a appris « que Charles avait pris une année sabbatique en travaillant comme « Boy » dans des revues parisiennes » ! La pauvre en était toute honteuse, moi ravie, j’imaginais mon père dansant dans la troupe des jeunes gens élégants en toile de fond de Mistinguett ou Joséphine Baker… Ce prologue tout en légèreté   n’a pas nui à sa carrière puisque, tout en travaillant, il a obtenu des diplômes de droit et d’expertise comptable qui l’ont amené en fin de carrière au poste d’Inspecteur central du Trésor.
- Et votre maman ?
-  Après ses études secondaires, Greffière de Juge de paix, elle menait une vie très sage due à son éducation… et à une  supposée malformation du cœur, difficilement décelable donc non curable.
Tu auras sans doute du mal à imaginer les longues fiançailles chastes entre Charles, divorcé d’un précédent mariage malheureux qu’il avait dû contracter pour « réparation » et Ninou la pure jeune fille... Charles divorcé, c’était la honte, on le montrait du doigt !  Quand il a rencontré celle qui serait ma mère, on exigeait de lui encore plus de preuves du sérieux de sa démarche en raison de son « passé » dans l’exercice conjugal… A l’époque c’était le but de  la période très chaste de « la fréquentation ». J’ai encore dans mes reliques les  broderies au petit point qu’ils exécutaient tous les deux pendant leurs dimanches après-midi de tendres causeries. Bref ils se marièrent.
-…Et eurent beaucoup d’enfants ?
- Hélas ce ne fut pas aussi rose que dans les contes de fées... Peux-tu réaliser qu’il n’y avait à l’époque aucun moyen de contraception ? Même la méthode Ogino n’était pas encore connue. Pour se « libérer » les femmes inventaient les pratiques les plus atroces à base de savon de Marseille, d’eau de javel, avaient recours aux »faiseuses d’anges », se martyrisant de toutes les manières  jusqu’aux plus graves blessures, jusqu’à la mort. Ainsi la vie de jeune femme de ma mère, dont le cœur était décidément trop faible pour mener à bien une autre  grossesse après ma naissance prématurée, a été marquée par une  série d’avortements. Dans son malheur elle a eu la chance d’être reconnue par le corps médical et a eu droit à des « avortements  thérapeutiques ». Ils la laissaient chaque fois plus faible avec la culpabilité de ne pouvoir « combler les vœux de son mari ». On parlait librement devant les enfants, sensés alors ne rien comprendre et  je me souviens de mon effroi quand elle évoquait avec ses amies l’abomination d’un curetage fait à vif, sans anesthésie…
- Quelle époque !
- Comme tu dis !  Entre la crise de 29 et la guerre de 39 au point de vue technologique c’était un essor sans pareil auquel les gens se sont immédiatement adaptés. Mais pour les mœurs… La race des hommes c’était quelque chose ! Supérieure, évidemment, tout ce qui était important, avait de la valeur, était fait par les hommes pour les  hommes. Aux femmes le foyer, les enfants, les tâches ménagères dans le sourire et la bonne humeur.
 « Ce sont les femmes qui font et défont les ménages » prêchait-on alors !
- Mais votre génération, en ce qui concerne les femmes en âge de reproduite, a été plus avertie, mieux protégée ?
- Voilà un mot que j’ai en horreur : « reproduite » qui semble réduire les femmes à une fonction pondeuse ! Mais non ce n’était guère plus  brillant. Le nouvel Ogino était arrivé, bien peu fiable, il y avait le coït interrompu, l’abstinence( !)  On n’apprenait pas les moyens de contraception dans les facultés de médecine. Je me souviens  même de mon jeune  docteur, déjà père de cinq enfants, et qui, un jour de courage, m’a demandé « comment je faisais avec mon mari pour limiter les dégâts». Il pensait, et tu vas le  dire aussi, que j’avais la chance et, c’est ben vrai,  comme disait la Mère Denis, d’avoir donné le jour à trois superbes enfants désirés. Vite après la dernière naissance  j’ai pu bénéficier de « la pilule », véritable sécurisation dans nos vies de jeunes femmes.
Pour en revenir au début de notre conversation j’avoue avoirs du mal à imaginer ce que seront ces nouvelles familles, ces nouveaux enfants,  ces nouvelles fratries.          Bah ! J’ai confiance en l’avenir.
Simplement  dans ma petite tête d’ancienne juriste je trouve aberrant ce qu’on appelle « Le droit à l’enfant ».
 Pour que tous ceux qui vont être conçus de quelque manière que ce soit, naître dans n’importe quel type de foyer, afin qu’ils s’y épanouissent  dans  un statut égalitaire, protégés et  heureux,  je crois qu’il faudra se pencher très sérieusement,  plus que jamais, sur le légitime  « DROIT  des ENFANTS ».

10 commentaires:

  1. No me deja traducirlo..pero bueno..te mando un saludo desde Murcia..y un beso.

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  2. A mí me ha pasado lo mismo, no me deja traducirlo, así que no me he enterado de nada.

    Besos.

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  3. Como siempr la cultura és tu meta más preferida

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  4. L'époque change, les relations familiales évoluent...Les enfants ne sont plus élevés par les parents mais sont placés dans des crèches ou chez des nourrices. Un jour le mariage n'existera plus.

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    1. Le regretté Pierre Desproges disait : "De nos jours plus personne veut se marier à part les curés et les pédés".

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  5. A veces la soledad interior,hace que algunas personas amen mucho más a su perro que a sus semejantes

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  6. Il me semble que le mariage revient à la mode.

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  7. Je crois qu´après une période de grande liberté des moeurs après 68, nos jeunes reviennent à un certain retour en arrière plus conservateur concernant les histoires de couple et le mariage.

    Bizz, Manou.

    Ça faisait des siècles que je n´entendait pas ce mot: salmigondis.

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  8. Oui, il faut que nous soyons particulièrement vigilants sur le droit des enfants.

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