mercredi 24 mai 2017

A savoir, citoyen...

"En annonçant qu'il prenait officiellement sa retraite, François Hollande rejoint le club très fermé des anciens locataires de l'Élysée encore vivants, composé de Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac et Valéry Giscard d'Estaing. Il va pouvoir bénéficier comme eux, à part Nicolas Sarkozy qui ne vient pas de la fonction publique, du statut en or massif des fonctionnaires cumulards.
On a beaucoup glosé à l'époque sur le montant exorbitant de la retraite mensuelle de Valéry Giscard d'Estaing, de l'ordre de 30 000 euros, qui incluait il est vrai les 12 750 euros d'indemnités de membre à vie du Conseil constitutionnel. Puis, sur celle de Jacques Chirac il y a dix ans, de 31 000 euros, mais qui ne touche plus ces dernières années que 18 000 euros par mois, ne participant plus aux délibérations du Conseil.
François Hollande, pour ce qui le concerne, depuis une loi de 2007, ne pourra pas cumuler autant que ses prédécesseurs, anciens fonctionnaires élus, mais il aura droit tout de même, hors Conseil constitutionnel – il a fait savoir qu'il n'irait pas –, à une retraite globale de 15 100 euros mensuels, à comparer aux 18 000 de Giscard et de Chirac. Ces 15 100 euros nets cumulent officiellement quatre pensions : 5 184 euros pour la présidence de la République, 6 208 euros au titre de sa fonction de parlementaire, 3 473 euros au titre de sa retraite de conseiller référendaire de la Cour des comptes et 235 euros comme ancien élu local.
Des retraites abusives dont ne peuvent bénéficier que des fonctionnaires
Deux remarques : ces 235 euros correspondent à l'ensemble des mandats locaux de François Hollande (4 ans président du conseil général de Corrèze et 7 ans maire de Tulle). C'est très peu mais c'est à cause d'une loi de 2007 qui a institué un plafonnement, appelé « écrêtement » en langage administratif, des rémunérations des élus qui sont déjà parlementaires. Ce n'était pas le cas de Jacques Chirac, qui a pu cumuler plein pot un certain nombre de pensions correspondant à ses mandats locaux (conseiller général de Meymac et maire de Paris) qui s'ajoutaient à son emploi fictif à la Cour des comptes.
Seconde remarque, à propos justement de ces emplois fictifs : les anciens présidents Chirac et Hollande, en plus de leurs attaches corréziennes, ont un autre point commun, le fait d'avoir pu continuer à cotiser à la Cour des comptes dont ils étaient issus administrativement mais où ils n'avaient jamais mis les pieds, sauf de façon intermittente à leur sortie de l'ENA. Nous sommes vraiment là au cœur d'un système caractérisé d'emplois fictifs qui permet des retraites abusives dont ne peuvent bénéficier que des fonctionnaires : un privilège qui a été supprimé en 2012 pour les députés, sans effet rétroactif bien entendu, mais qui continue de s'appliquer ailleurs.
Pour bénéficier dans le privé d'une retraite de l'ordre des 3 500 euros nets attribués à François Hollande par la Cour des comptes, il faut pouvoir justifier de cotisations élevées sur des salaires bruts moyens de l'ordre de 7 000 euros pendant au moins 25 ans (les fameuses « 25 meilleures années » du privé face aux 6 derniers mois du public), ce qui est réservé à des cadres d'un certain niveau. Quand on sait d'autre part que les anciens présidents de la République, en plus de leurs autres pensions et avantages en nature considérables – un appartement de fonction, une voiture, deux chauffeurs, deux personnes de service, sept collaborateurs et une protection rapprochée -, perçoivent jusqu'à la fin de leurs jours une dotation d'un montant égal à celui du traitement d'un conseiller d'État, 5 164 euros nets mensuels, on peut imaginer à quel point la République est généreuse à leur égard : après leur décès, il sera encore versé la moitié de cette dotation à leurs héritiers familiaux.
Et si on s'inspirait du modèle britannique ?
Pour bien comprendre ce que représente de nos jours une retraite de 15 000 euros nets, il faut savoir que, pour en bénéficier, un cadre du privé devra avoir cotisé pendant 25 ans sur un salaire brut moyen de 29 420 euros, soit le plafond actuel de la Sécu, plus 8 fois la tranche A, montant maximum sur lequel sont assises les cotisations ouvrant droit à prestations : au-delà il faut cotiser à titre privé auprès d'un assureur. Ces 29 420 euros, sur lesquels les cotisations mensuelles de retraite, salariales et patronales cumulées, sont de 4 100 euros, ce qui est considérable, correspondent à un salaire brut annuel de 353 000 euros, soit une addition géante de 8,8 millions d'euros sur 25 ans.
Avec ses 15 000 euros nets par mois, François Hollande qui, dans la pratique, n'a jamais rien fait d'autre que de la politique aux frais du contribuable touchera vraiment une retraite de nabab ! Fin 2016, Alain Chrétien, député-maire de Vesoul et soutien de Bruno Le Maire, avait proposé à l'occasion de la loi de finances de 2017 de supprimer le régime d'exception des députés permettant des retraites importantes malgré de très faibles cotisations, mais la majorité socialiste avait refusé tout débat à ce sujet.
Au moment où il est question de donner des responsabilités éminentes à la « société civile » et pour égaliser les systèmes de retraite et les conditions d'accès aux mandats parlementaires entre fonctionnaires et salariés du privé, il faudrait peut-être, sur le modèle britannique, obliger les fonctionnaires à quitter d'abord leur administration avant de pouvoir se présenter à des élections. Bruno Le Maire, le nouveau ministre de l'Économie, l'a fait. Il a démissionné et abandonné son statut de fonctionnaire, tout comme le nouveau président de la République, Emmanuel Macron, et, à notre connaissance, quelques autres énarques, dont Valérie Pécresse, la présidente LR de la région Île-de-France. Cela mérite d'être souligné, mais cette attitude vertueuse, on l'a compris, est extrêmement rare.
Ces incroyables privilèges réservés aux fonctionnaires
François Hollande voulait instituer une « République exemplaire » et « moraliser » la vie publique. Il avait raison. Il est cependant pour le moins étonnant qu'il n'ait pas su ou pas voulu profiter de son quinquennat pour modifier ces incroyables privilèges réservés aux fonctionnaires. Ils sont tellement abusifs qu'on peut se poser des questions de fond sur la réelle moralité de nos plus hauts dirigeants issus de la fonction publique, à commencer par celle de François Hollande lui-même. En effet, il n'aurait pas hésité, nous dit-on, à se faire attribuer un somptueux appartement de fonction de 350 mètres carrés dans l'un des quartiers les plus chers de Paris face aux jardins des Tuileries, avec un loyer de 15 000 euros par mois, du même montant que sa retraite de nabab. Question subsidiaire : de combien d'argent un membre de la société civile devrait-il disposer en France, s'agissant de ressources nettes d'impôts, pour s'offrir un tel loyer de 180 000 euros par an ? La réponse fait peur…" Le Point 23.05.17

5 commentaires:

  1. C'est ainsi que fonctionne ce que l'on appelle une démocratie, ce beau mot dont tout le monde se rempli la bouche, ou est la différence avec un état totalitaire?
    Amicalement
    Claude

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  2. Estimada manouche.. Il est que la politique est devenue une activité très lucrative ..
    Una abraçada..

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  3. Ellos hacen las leyes en su beneficio.

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  4. La démocratie,Claude, c'est "cause toujours" et le totalitarisme c'est "ferme-la."
    Bzzz...

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  5. Que buena vista que tienes, yo no veo un carajo con esa letra, y si encima no lo entiendo "pa qué te cuento".

    Besos.

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