lundi 18 novembre 2013

Conversation avec Cora - 1 -

                Charles 1918.                                             

-  Bonjour, mignonne.
Ces commémorations du 11 novembre réveillent en moi des souvenirs d'enfance et mettent à nouveau en lumière mon père et sa famille.
- J'avais entendu dire que les poilus de retour n'aimaient pas évoquer leurs souvenirs de guerre.
- C'est vrai mais quand on est enfant on surprend ces conversations d'adultes dont on est très friand, et puis il y a l'histoire de la famille que chacun doit connaître. C’est ainsi que toute petite fille j'ai appris le sort de "nos" hommes pendant le conflit de 14-18 . Par exemple celui de mon grand père, Antoine père de six enfants, mobilisé en même temps que ses deux aînés, Jean et Dominique laissant au foyer ma grand mère, Charles et deux petites filles.
-   Mais ce n'est pas possible !
- Bien sûr que si ! Et tout le monde trouvait cela normal. Au point que mon père, Charles, le plus jeune fils âgé de quinze ans en 14 aurait voulu rejoindre son père et ses frères. Je sais cela parait fou maintenant mais il faut réaliser le patriotisme et l'enthousiasme de ces hommes dont on leur disait que la patrie avait besoin d'eux...Imagine le manque total de moyens de communication et les rares journaux faisant plus d'intox que d'info...
Alors le 18 octobre 1917, le jour de ses dix huit ans  mon père, Charles, s'est engagé volontairement;
- Si je comprends bien il n'était pas question d'une manœuvre type " il faut sauver le soldat Ryan"!
- Pense tu ! Le conflit s'éternisait et il fallait toujours plus de chair à canon.
Où étaient son père Antoine et ses deux frères aînés Jean et Dominique, dans quel secteur dans quel pourrissoir ? Nul  ne le savait même pas eux sans doute, isolés , ahuris, blessés, qu'on faisait aller de nuit d'une tranchée à l'autre dans un espace désolé, bouleversé, sans repère.
Donc Charles, mon père a été envoyé immédiatement sur le front où régnait le plus grand désordre. Grâce aux chroniqueurs de guerre, aux historiens citant des lieux , des dates, ils ont appris à postériori ce qui leur était arrivé... Pour eux c'était, on ne sait où la même horreur, chaque jour anonyme apportant son lot de morts.
Je voudrais donner la parole à mon père pour les rares récits qu'il nous a livrés.
- Dès mon arrivée j'ai été brocardé par des poilus qui étaient en majorité âgés et qui avaient derrière eux des années de guerre.
- Toi, le gamin tu te débrouilleras pour faire le lien avec la seconde ligne et nous porter des nouvelles et de la nourriture. Je préférais cette affectation à celle des « nettoyeurs » envoyés dans les tranchées ennemies conquises pour finir les mourants à l'arme blanche.
Ce jour là je revenais de la roulante avec le bidon de soupe pour ma section. J'avais passé un bout de bois entre les anses pour le porter à deux mains. Tout à coup j'entends le sifflement caractéristique d'un obus, celui-là il est pour moi. Bang ! Un éclat sectionne le morceau de bois entre mes mains me laissant indemne . Je me souviens en voyant le contenu du bidon répandu dans la boue de ma seule pensée du moment : je devrais affronter la colère de mes camarades affamés.
Très vite les bombardements se sont intensifiés, nos tranchées démantelées. Une nuit dans un trou d'obus je dormais recouvert d'une bâche j'ai été enterré par la terre rejetée après l'éclatement d'une saleté à l'ypérite . Grâce au peu d'air que me laissait la bâche j'ai pu hurler et pendant une accalmie des camarades sont venus me déterrer. L'ypérite m'avait rendu aveugle et mangé un poumon.
- Ma petite amie je m'arrête là j'ai peur que ces vieux récits te fatiguent.
- Oh ! Non, Cora je reviendrai et vous me raconterez la fin de cette terrible histoire.

9 commentaires:

  1. Messieurs qu'on nomme grands.... etc...

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  2. coucou,
    Adorable ta 'CORA'
    et adorable tu es..
    d'etre a ses cotés
    douce journée à toi
    bizzz

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  3. je dois partir, je relirai ça calmement car.... je crois que ça en vaut vraiment le coup !
    bises

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  4. jze viens de faire une copie je reviendrai te dire quand je l'aurai lu
    bisous , je suis ravie de te lire en allant à la piscine
    tu m'as fait rire dans ton commentaire de ne pas rater sol Lewit au retour
    merci c'est bon de commencer la journée par un éclat de rire
    belle semaine

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    1. je m'y remets . je me suis balader dans paris avec et je me suis regalée de la qualité du genre , de la qualité de la relation , et la transcription et le sujet qui n'est pas facile a mettre en mots dans la justesse de ce récit
      merci à vous deux.
      je m'abonne sur la suite , bienttôt viendra un texte tu comprends la

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  5. Cuándo observamos la viejas fotografias,contemplamo un pasado que ya és história

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  6. Quel récit ! Je hais la guerre. Les hommes ont mieux à faire!
    Attendons la suite...

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  7. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  8. Quelle terrible c'est toujours la guerre. Quel courageuse Charles, était si jeune à l'époque.

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