- Mon Dieu te revoilà déjà, ma chérie ! Je pense que
j’ai dû te faire une méchante impression à ta dernière visite. T’inquiète je ne
suis pas suicidaire, j’adore la vie et je ne suis pas pressée de passer l’arme
à gauche !
- J ‘ai eu du mal à arriver jusqu’à vous à travers la
manifestation « Pour la famille ».
- Qu’est ce que cela veut dire « Pour la famille » ?
-Ne me dites pas que vous n’en savez vraiment rien !
- Tout de même je suis au courant ! Les media regorgent
d’explications et de commentaires qui
vont des mariages homosexuels aux mères porteuses en passant par la F.I.V, la G .M .A, la P.M.A …et hier j’ai entendu parler de la
congélation des ovocytes qui permettrait aux femmes d’avoir des enfants avec
qui et quand elles le désirent… Sans compter avec les querelles sur
l’adoption ! On ne peut guère ignorer toutes ces questions, le salmigondis
qui en est fait et les polémiques sur les réponses ….
- Effectivement les problèmes sont complexes et posent des
questions d’éthique mais chaque fois que la science fait une découverte il
faut s’attendre à ce qu’elle passe dans
le domaine des applications.
- J’ai peur que notre conversation sur ces sujets, dont même
les spécialistes ne mesurent vraiment
pas les tenants et les aboutissants,
ressemble à une naïve brève de
comptoir ! Pour ce que je peux comprendre mon souci est qu’un enfant devrait
être « le même » quelle que soit la façon dont il est venu au
monde et chéri également. Comment va-t-il évoluer dans tous ces cas de figure ?
On connait mieux maintenant les difficultés que rencontrent certains enfants adoptés et même quelquefois ceux qui
vivent dans des familles dites recomposées, alors avec toutes ces nouvelles
possibilités…
- Il y a aussi des
malheureux dans des familles « traditionnelles » …
- Hélas. Mais tu vois l’avantage d’être un vieux machin
comme moi, c’est de s’intéresser à tout, au flot des évolutions sociales…Mais
depuis la rive.
- La famille, les enfants ce devait être plus simple
autrefois ?
- Plus simple mais tout aussi difficile, tiens, cela me donne l’occasion de te parler de mes
parents.
Après la guerre en 1919 mon père, dix-neuf ans, était frais diplômé de Joinville.
Le sport n’étant pas à l’époque un moyen de gagner sa vie, il a passé tous les
concours administratifs ouverts en priorité aux rescapés de la Grande guerre.
Il avait depuis son enfance la passion des chiffres et depuis ses années de collège il gagnait
pratiquement autant que son père en tenant la comptabilité des commerçants de
son quartier. Le voilà donc Commis des contributions indirectes. Je
suppose que, si jeune, après avoir vécu l’horreur, il n’avait guère envie de
rentrer illico dans un carcan administratif. D’ailleurs une de mes tantes,
toute confuse de me faire pareille révélation, m’a appris « que Charles
avait pris une année sabbatique en travaillant comme « Boy » dans des
revues parisiennes » ! La pauvre en était toute honteuse, moi ravie,
j’imaginais mon père dansant dans la troupe des jeunes gens élégants en toile
de fond de Mistinguett ou Joséphine Baker… Ce prologue tout en légèreté n’a pas nui à sa carrière puisque, tout en travaillant,
il a obtenu des diplômes de droit et d’expertise comptable qui l’ont amené en
fin de carrière au poste d’Inspecteur central du Trésor.
- Et votre maman ?
- Après ses études
secondaires, Greffière de Juge de paix, elle menait une vie très sage due à son
éducation… et à une supposée malformation
du cœur, difficilement décelable donc non curable.
Tu auras sans doute du mal à imaginer les longues
fiançailles chastes entre Charles, divorcé d’un précédent mariage malheureux
qu’il avait dû contracter pour « réparation » et Ninou la pure jeune
fille... Charles divorcé, c’était la honte, on le montrait du doigt ! Quand il a rencontré celle qui serait ma mère,
on exigeait de lui encore plus de preuves du sérieux de sa démarche en raison
de son « passé » dans l’exercice conjugal… A l’époque c’était le but
de la période très chaste de « la
fréquentation ». J’ai encore dans mes reliques les broderies au petit point qu’ils exécutaient
tous les deux pendant leurs dimanches après-midi de tendres causeries. Bref ils
se marièrent.
-…Et eurent beaucoup d’enfants ?
- Hélas ce ne fut pas aussi rose que dans les contes de fées...
Peux-tu réaliser qu’il n’y avait à l’époque aucun moyen de contraception ?
Même la méthode Ogino n’était pas encore connue. Pour se « libérer »
les femmes inventaient les pratiques les plus atroces à base de savon de Marseille,
d’eau de javel, avaient recours aux »faiseuses d’anges », se
martyrisant de toutes les manières jusqu’aux plus graves blessures, jusqu’à la
mort. Ainsi la vie de jeune femme de ma mère, dont le cœur était décidément
trop faible pour mener à bien une autre grossesse après ma naissance prématurée, a été
marquée par une série d’avortements.
Dans son malheur elle a eu la chance d’être reconnue par le corps médical et a
eu droit à des « avortements thérapeutiques ». Ils la laissaient
chaque fois plus faible avec la culpabilité de ne pouvoir « combler les vœux
de son mari ». On parlait librement devant les enfants, sensés alors ne
rien comprendre et je me souviens de mon
effroi quand elle évoquait avec ses amies l’abomination d’un curetage fait à
vif, sans anesthésie…
- Quelle époque !
- Comme tu dis ! Entre la crise de 29 et la guerre de 39 au
point de vue technologique c’était un essor sans pareil auquel les gens se sont
immédiatement adaptés. Mais pour les mœurs… La race des hommes c’était quelque
chose ! Supérieure, évidemment, tout ce qui était important, avait de la
valeur, était fait par les hommes pour les
hommes. Aux femmes le foyer, les enfants, les tâches ménagères dans le
sourire et la bonne humeur.
« Ce sont les femmes
qui font et défont les ménages » prêchait-on alors !
- Mais votre génération, en ce qui concerne les femmes en
âge de reproduite, a été plus avertie, mieux protégée ?
- Voilà un mot que j’ai en horreur :
« reproduite » qui semble réduire les femmes à une fonction
pondeuse ! Mais non ce n’était guère plus
brillant. Le nouvel Ogino était arrivé, bien peu fiable, il y avait le
coït interrompu, l’abstinence( !) On n’apprenait pas les moyens de contraception
dans les facultés de médecine. Je me souviens même de mon jeune docteur, déjà père de cinq enfants, et qui,
un jour de courage, m’a demandé « comment je faisais avec mon
mari pour limiter les dégâts». Il pensait, et tu vas le dire aussi, que j’avais la chance et, c’est
ben vrai, comme disait la Mère Denis,
d’avoir donné le jour à trois superbes enfants désirés. Vite après la dernière
naissance j’ai pu bénéficier de
« la pilule », véritable sécurisation dans nos vies de jeunes femmes.
Pour en revenir au début de notre conversation j’avoue avoirs
du mal à imaginer ce que seront ces nouvelles familles, ces nouveaux enfants, ces nouvelles fratries. Bah ! J’ai confiance en l’avenir.
Simplement dans ma
petite tête d’ancienne juriste je trouve aberrant ce qu’on appelle « Le
droit à l’enfant ».
Pour que tous ceux
qui vont être conçus de quelque manière que ce soit, naître dans n’importe quel
type de foyer, afin qu’ils s’y épanouissent dans un
statut égalitaire, protégés et heureux, je crois qu’il faudra se pencher très
sérieusement, plus que jamais, sur le
légitime « DROIT des ENFANTS ».
No me deja traducirlo..pero bueno..te mando un saludo desde Murcia..y un beso.
RépondreSupprimerA mí me ha pasado lo mismo, no me deja traducirlo, así que no me he enterado de nada.
RépondreSupprimerBesos.
Como siempr la cultura és tu meta más preferida
RépondreSupprimerL'époque change, les relations familiales évoluent...Les enfants ne sont plus élevés par les parents mais sont placés dans des crèches ou chez des nourrices. Un jour le mariage n'existera plus.
RépondreSupprimerLe regretté Pierre Desproges disait : "De nos jours plus personne veut se marier à part les curés et les pédés".
SupprimerA veces la soledad interior,hace que algunas personas amen mucho más a su perro que a sus semejantes
RépondreSupprimerIl me semble que le mariage revient à la mode.
RépondreSupprimerJe crois qu´après une période de grande liberté des moeurs après 68, nos jeunes reviennent à un certain retour en arrière plus conservateur concernant les histoires de couple et le mariage.
RépondreSupprimerBizz, Manou.
Ça faisait des siècles que je n´entendait pas ce mot: salmigondis.
Oui, il faut que nous soyons particulièrement vigilants sur le droit des enfants.
RépondreSupprimerbien sûr manouche ... bisous
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