lundi 21 octobre 2019

Billet d'humour de Jean D'Ormesson, écrivain, journaliste et philosophe français. 1925-2017

"Myope comme une taupe», «rusé comme un renard», «serrés comme des sardines»...
les termes empruntés au monde animal ne se retrouvent pas seulement dans les fables de La Fontaine, ils sont partout.
La preuve: que vous soyez fier comme un coq, fort comme un boeuf, têtu comme un âne, malin comme un singe ou simplement un chaud lapin, vous êtes tous, un jour ou l'autre, devenu chèvre pour une caille aux yeux de biche.

Vous arrivez à votre premier rendez-vous fier comme un paon et là... pas un chat!
Vous faites le pied de grue, vous demandant si cette bécasse vous a réellement posé un lapin.
Il y a anguille sous roche et pourtant le bouc émissaire qui vous a obtenu ce rancard,
la tête de linotte avec qui vous êtes copain comme cochon, vous l'a certifié: cette poule a du chien, une vraie panthère!
C'est sûr, vous serez un crapaud mort d'amour.
Bon, vous vous dites que dix minutes de retard, il n'y a pas de quoi casser trois pattes à un canard.
Sauf que la fameuse souris, malgré son cou de cygne et sa crinière de lion est myope comme une taupe, elle souffle comme un phoque et rit comme une baleine.
Une vraie peau de vache, quoi! Et vous, vous êtes fait comme un rat.
Vous roulez des yeux de merlan frit, vous êtes rouge comme une écrevisse, mais vous restez muet comme une carpe.
Elle essaie bien de vous tirer les vers du nez, mais vous sautez du coq à l'âne et finissez par noyer le poisson.
Vous avez le cafard, l'envie vous prend de pleurer comme un veau (ou de verser des larmes de crocodile, c'est selon...).
Vous finissez par prendre le taureau par les cornes et vous inventez une fièvre de cheval qui vous permet de filer comme un lièvre.
C'est pas que vous êtes une poule mouillée mais vous ne voulez pas être le dindon de la farce.
Vous avez beau être doux comme un agneau sous vos airs d'ours mal léché, faut pas vous prendre pour un pigeon car vous pourriez devenir le loup dans la bergerie.
Et puis, ça aurait servi à quoi de se regarder comme des chiens de faïence.
Après tout, revenons à nos moutons: vous avez maintenant une faim de loup, l'envie de dormir comme un loir et surtout vous avez d'autres chats à fouetter."

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5 commentaires:

  1. Notre langue est vraiment très imagée et Jean d'O était un virtuose des mots!

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  2. Nunca lo había pensado, Manouche, al fin y al cabo también somos animales. Muy divertida esta recopilación.

    Se me ocurre: tengo piel de gallina, no te rías como una hiena ni te arrastres como un gusano.

    Un beso,

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  3. C'est un monde animal, au bout du compte, ce sont eux qui nous apprennent à vivre en liberté .. Mais la composition est magnifique .. Félicitations.
    Una abraçada manouche.

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  4. Un grand bonhomme... Un réel plaisir de le lire, même si ces idées politiques ne sont pas les miennes. Un grand de la langue française - la toute belle!

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