- Aujourd’hui vous deviez me parler de votre grand-mère aux
neuf enfants…
-Je ne crois pas que c’était tellement exceptionnel à cette
époque de l’après- guerre de 14-18, retour des rescapés avides de vivre et
consignes de repopulation.
Les difficultés matérielles étaient quasi insurmontables. Je
t’ai déjà dit que Mémé avait du élever seule deux de ses enfants pendant le
conflit où elle tremblait de perdre son mari et ses quatre aînés. Il faut
ajouter les grands- parents survivants, qui vivaient avec elle, suivant la
coutume, et qu’elle devait aussi
nourrir. Ces trois générations habitaient une espèce de grosse ferme :
« La garde meurt ».
"Notre" bâtard qui l’avait eu en dotation n’était pas napoléonien mais plutôt celui d’un général d' Empire de retour de la campagne d'Espagne…
"Notre" bâtard qui l’avait eu en dotation n’était pas napoléonien mais plutôt celui d’un général d' Empire de retour de la campagne d'Espagne…
- Çà alors ! Vous n’avez pas cherché à savoir qui
c’était ?
-Bah ! la généalogie n’était pas à la mode et il
suffisait à mes grands parents de savoir que leur belle demeure venait d’un
lointain ancêtre qui, de plus, avait reçu la charge d’Inspecteur des Eaux et
Forêts. Ce n’était pas le luxe mais, avant la guerre ils vivaient gentiment, rien de plus car dans
l’intervalle des générations mon arrière grand-père, joueur invétéré avait
flambé le capital !
La vente de « La garde meurt » avait permis à Mémé de tenir tant bien que mal pendant les quatre ans de guerre.
La vente de « La garde meurt » avait permis à Mémé de tenir tant bien que mal pendant les quatre ans de guerre.
-Mais quelle femme !
- Je t’assure qu’elle ne se prenait pas pour une héroïne,
quand je l’ai connue elle était déjà âgée, je me souviens d’une gentille petite
dame qui me souriait en cachant de sa main tavelée sa bouche édentée. Quand
nous allions la voir, elle couvait mon père d’un regard d’adoration, c’était
son Charlou . Ils se tenaient les mains et parlaient très peu. Mémé savait que
j’étais Cora et ne me confondait pas avec l’un de sa trentaine de petits-enfants. C’étaient de rares visites, j’étais toute petite mais je ressentais
d’une manière animale, cette vieille femme comme un petit morceau d’amour brut.
Je me souviens d’un rituel qui m’amusait beaucoup. Mon père demandait à mémé :
- Maman, tu as de la chicorée ? Oui ? Alors apporte-moi le
paquet s’il te plait. Et quand ma mémé s’exécutait mon père lui disait en
riant :
- Et maintenant fais nous un vrai café. Pendant que la
cafetière chantait sur le fourneau tout le monde s'esclaffait à cette plaisanterie
toujours répétée, ce code simplet de convivialité pour eux si précieux!
- Vous avez d’autres
souvenirs la concernant ?
- Plus tard j’ai appris une anecdote, si on peut dire,
qui m’a marquée. Il y avait évidemment une grande différence d’âge entre son
premier fils Jean et son dernier-né René. Le premier fils de Jean est né en
même temps que René. La femme de Jean de
santé fragile ne pouvait allaiter son bébé. Le médecin assurait que ce bébé ne
survivrait que s’il était nourri au sein. C’est ainsi que Mémé faisait téter en
même temps son premier petit-fils et son dernier fils.
- Cora, vous exagérez !
- Non mon petit et je peux te dire que l’oncle et le neveu
ont vécu toute leur longue vie comme des jumeaux inséparables.
- Mais tous ces enfants que sont-ils devenus ?
- Comme disait Mémé : « les enfants de l’école
laïque et républicaine » et tous ont fait de belles carrières dues à leur
mérite.
- Votre pauvre Mémé a du mourir assez jeune
d’épuisement ?
- Sans secours matériels, sans "aide psychologique", travaillant sans relâche. Elle a pourvu les siens de toutes les nourritures, celles qui
maintiennent en vie et celles qui la rendent heureuse et accompli son
destin anonyme, modeste, efficace dans la douleur ou le plaisir. Oui, elle est
morte jeune….
A quatre- vingt- onze- ans. Et Cora dans un éclat de rire :
A quatre- vingt- onze- ans. Et Cora dans un éclat de rire :
- C’est jeune, non ?
J'ai aussi participé un groupe sur la mémoire collective. Jouez les souvenirs de ces personnes a été une expérience intéressante et passionnante.
RépondreSupprimerMaintenant, quand je lis vos conversations avec Cora, je me sens l'émotion qui a été impliqué dans cette expérience et ce que j'ai appris avec les personnes âgées.
Saludos y buen fin de semana :-)
coucou,
RépondreSupprimerTrés jeune....:-)
j'adore
j'anime deux groupes de mémoire
et des superbes histoires comme celle ci...
on m'en conte...
c'est tellement chouette..
merci,
pour ton partage..
bizz
♥
voilà elle est sur mon bureau prés à partir dans mon sac pour la lecture en autobus.
RépondreSupprimeret je reviendrai aprés conversé avec toi. gros bisous
merci de ce partage.
lu bois de vincennes la grand mére vécue si longuelent çà c'est chapeau . continuez chére manouche et cora éffleuillé le chapelet des photos de la boites du temps gros bisous je me suis regalée.
SupprimerAh, merci pour ces moments privilégiés et si importants pour la mémoire...
RépondreSupprimerBISOUS
Merci pour ces conversations avec Cora qui assurent la transmission. Et sa vision humoristique qui redonnent le moral face à des événements pas toujours drôles.
RépondreSupprimerBravo Mémé !! Tout cela me rappelle des souvenirs de famille.
RépondreSupprimerLa memoria és tan frutífira que nos acompañara hasta el final
RépondreSupprimerMi abuela se dedicaba al contrabando de café (y rodamientos) entre Irún y Hendaya. La guerra le hizo pobre, tanto que se arriesgaba con cárcel por satisfacer a los nuevos ricos, los vencedores tras la contienda.
RépondreSupprimerHasta que mi abuela murió, siempre le añadía al "calcetín" una cucharada de achicoria al café, como recuerdo (imagino) de otros tiempos; duros, mas no tan malos.
Gracias por tu sympatica contribucion.
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