C’était au cours d’un voyage sur
l’Amazone, finalisant une mission au Brésil. Partis de Manaus nous allions sur
ce fleuve impressionnant cabotant de
village en village. Identiques, modestes regroupements de cases au bord de
l’eau avec leurs troupes bruyantes d’enfants nus et dorés proposant qui un
singe agressif qui un perroquet dédaigneux. Après quelques jours dans ce climat
tropical humide la fatigue commençait à se faire sentir surtout que les nuits
sur le bateau à l'ancre n’étaient guère reposantes. Somptueuses certes, avec des ciels
étoilés soudains envahis de titanesques nuées orageuses d’un noir violet,
l’énorme mouvement des masses d’eau sombre sous la coque et, venant de la terre,
le jacassement des milliers d’animaux de
la forêt, mais… Mais nous dormions sur le pont dans des hamacs, alignés comme
de monstrueuses larves. Avec, en guise de couverture, une grande feuille de plastique qui s’alourdissait au
fur et à mesure des réguliers abats de pluie. Le vent soufflant en rafales il
était courant que le hamac d’un des passagers se décroche, on entendait alors
un grand boum éclaboussé et le cri du malheureux qui s’affalait sur le pont au
milieu des rires des autres larves plus chanceuses.
Nous étions sur le chemin du retour et devions
achever le périple dans un village plus important où nous attendait le
« banquet « final. Des tables étaient dressées dans un vaste hangar
de tôle, tassés au fond des musiciens
accroupis avec des instruments indéfinissables... On voyait dans la cuisine
attenante s’affairer des femmes en chemise longue de coton brut. Des touristes
venus d’ailleurs s’installaient avec nous. On nous servit du poisson
évidemment, avec en cadeau ses monstrueuses écailles rugueuses si solides que les
indigènes s’en servent de limes. A la fin du repas entrait un groupe de jeunes
gens des deux sexes affublées de vêtements exotiques trop neufs. Ils se mettaient à danser avec les musiciens
subitement réveillés. Rythme joyeux mais visages frais inexpressifs de ceux
appelés par les anciens à perpétrer sans enthousiasme ces coutumes qui attirent
le chaland et qui n’y voient que le côté commercial. Autour de moi l’assistance
un peu blasée photographiait, distribuait quelques sous… J’étais un peu
attristée ...puis par l’ouverture sur la cuisine j’ai vu les femmes abandonner
leurs bassines à vaisselle et se mettre en mouvement ! Je suis allée les
rejoindre spontanément, elles m’ont attirée dans leur ronde. Je n’oublierai
jamais comment je m’y suis immédiatement intégrée, les regards
brillant de la joie de l'accueil manifesté par ces femmes âgées en majorité et qui jouissaient pleinement de ce moment de
plaisir partagé. Elles me souriaient, me donnaient amicalement la main et nous
étions là dans cette musique viscérale dansant dans le même rythme, simplement en tant que femmes . Malgré toutes nos différences, unies dans
le mouvement de nos corps porteurs des
traces d’un même vécu d’épouses, de mères assorti des mêmes joies et des mêmes
peines…
En nage, échevelées, rieuses
nous sautions en parfaite harmonie.
Quand la musique s’est tue nous nous sommes spontanément embrassées.
Quand la musique s’est tue nous nous sommes spontanément embrassées.
Il y avait des larmes aussi.
Un instant magique de partage intense !! Un souvenir qui restera sans doute gravé dans la mémoire !
RépondreSupprimerLa danse et la musique exponentielle nous infectent de la joie de vivre, aussi simple soit-elle.
RépondreSupprimerUna abraçada manouche..
En lisant ton billet, tu m'as rappelé le bouquin de Clarissa Pikola Estès: "Femmes qui courent avec les loups".
RépondreSupprimerUn seul instant qui unit "la femme" dans l'univers, d'où qu'elle vienne, spirale cosmique : centre, air, feu, planète et terre: Mèr(e)
Bizz, ma gitane.
Magnifique entrée.
Chapeau, Mme!!