Les croix reflétaient la lumière d’une lune à demi cachée
par des nuages rapides.
Adèle pleurait
dans le soir qui tombait mollement.
Sentinelles au
garde à vous, de longs cyprès frémissaient contre les murs où se projetaient
leurs ombres tremblantes.
Une foule d’amis, silencieuse, reniflait. Des nez
coulaient dans le pincement de mouchoirs noirs. Près d’eux, Antoine, ami
d’enfance d’Adèle, un peu en retrait, la regardait.
Un début de
Mistral décoiffait les bouquets de plastique bruissant au pied des tombes.
Adèle essuyait ses yeux rougis, ses jambes se dérobaient,
elle se sentait perdue, abandonnée. Elle détournait son regard vers les plis de
sa mantille agités par le vent. Elle était veuve et belle de douleur.
A côté du caveau familial, fort de sa grille repeinte et
de sa gothique pierre grise, ne s’apercevait pas les plus modestes sépultures,
celles de terre sur Terre, ces monticules
que franchissent parfois, en plein été, des groupes de fourmis, de
cloportes affamés ou de mantes religieuses.
Adèle avait entendu Antoine, son ami d’enfance, faire
l’éloge de son mari, Hugo, maintenant enfermé dans un coffre de chêne. Elle
avait le regard égaré. Et les mots d’Antoine résonnaient encore sous son crâne:
« …Elle avait su donner à Hugo tellement, tellement de bonheur … ».
Les marbres tourmentés des tombes monstrueuses qui
l’entouraient, reluisant de tâches livides, la firent
vaciller.
Antoine qui avait remarqué le malaise d’Adèle
s’approchait d’elle et passait un bras protecteur sur son épaule, la serrant un
instant contre lui.
L’église voisine avait pris des allures fantomatiques au
gré des lueurs mouvantes animées par le défilé des
nuages.
Adèle priait, elle priait pour l’âme d' Hugo qui
s’élevait là-haut en croissant de lune, comme les bras qu’avait tendu le prêtre
vers la voute du chœur … tandis qu’Antoine repoussait la pensée fugitive des
croissants chauds qu’il n’avait pas pris au petit
déjeuner.
Dans le lointain, les gémissements lancinants d’un chien
perdu montaient dans le crépuscule comme un cyprès sonore, et retombaient dans le
silence.
Les pleurs d’Adèle redoublaient, laissant sur ses joues
une rosée prometteuse de printemps.
La lourde grille de fer du portail d’entrée s’était
ouverte dans un long grincement.
La foule d’amis s’éloignait. Alors, Adèle tendit, à
Antoine resté seul à ses côtés, son mouchoir de batiste brodé de ses initiales :
A.
et H.
Tus elucubraciones vuelan mucho más alto que todas mis fantasias
RépondreSupprimerje viens de le mettre sur papier et je reviens t'en converser
RépondreSupprimergros bisous
j'ai pris le temps de le lire sur papier . je trouve toujours cette même joie de la précision , de ce détail qui nous donne tout le dessus l'en dedans
RépondreSupprimeret le sujet est terrible , le style nous le donne par le receuillement et la dignité de le dire hommage à ces êtres en deuil.
merci manouche . tu es importante pour moi ta plume renforce ma quête en mon écriture. a tout bient^to
Tu écris merveilleusement bien. Un beau texte. On s'y croirait.
RépondreSupprimerBon, pour Louis, c'est fini; pour Antoine, ça peut se faire... mais A.H....quidonquesse?
RépondreSupprimerEt la vie continue...
RépondreSupprimerBizz, Manou.