L’éditeur avait reçu à contre cœur cette mère portant le
manuscrit de son fils, un volumineux
gribouillis illisible qu’elle déclarait « exceptionnel » .
Une mère,évidemment !
Son récit tournait au drame quand elle apprit à l’éditeur que
son fils s’était suicidé en 1969 à trente deux ans pour la seule raison
que pas un seul éditeur ne s’était aventuré à la publication de son ouvrage !
Apitoyé, résigné l’éditeur ne l’était pas resté longtemps, de plus en
plus enthousiasmé par la lecture de cet étrange
monument ! Écrit au début des années 1960
le livre sera donc édité
seulement en 1980 il connut un grand succès et fut couronné par le prix
Pulitzer en 1981.
« La conjuration des imbéciles » de John Kennedy
Toole a pour anti héros une sorte de Don Quichotte adipeux et hypocondriaque, espèce de Hardy aussi râleur
que Laurel, accroché à sa mère qu’il rabaisse méchamment. Entouré d’un petit
monde grouillant qui ne pense qu’à survivre de petits boulots en
mini-escroqueries dans la moiteur étouffante du bayou, il fustige, en paroles
méchantes, tout et tous. Qu’il soit en chemise de nuit plus que douteuse ou au
cinéma se goinfrant de popcorns il manifeste un mépris cinglant
contre Freud, les homosexuels, les hétérosexuels, les travestis, les noirs, la
vie moderne… enfin le monde entier résumé dans le microcosme sordide des bas
quartiers de la Nouvelle Orléans.
Cette gargantuesque tragi-comédie qui met en scène une multitude de personnages
qu’on dirait extraits d’un de ces
dessins foisonnants de Dubout est parcourue des fulgurances philosophiques d’un
moraliste impuissant. Cette grosse farce jubilatoire n’est
pas dépourvue d’un humanisme un peu
pervers qui fait que le rire anime toute cette originale philosophie.
J.K Toole avait placé en tête de son livre cette citation
de Swift :
« Quand
un vrai génie apparait en ce bas monde, on peut le reconnaître à ce signe que
les imbéciles sont tous ligués contre lui. »
Une lecture in-dis-pen-sa-blé.
RépondreSupprimerBizz.